Infrastructures sportives : la mise en valeur se fait attendre

Samedi 4 Octobre 2014 - 19:00

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimableEnvoyer par courriel

Depuis 2006, le gouvernement s’est lancé dans la construction des stades de football, dans les chefs-lieux des départements. L'objectif étant d’offrir à la jeunesse congolaise des espaces d’expression de ses talents sportifs.

À la faveur de la municipalisation accélérée, six nouveaux stades se sont ajoutés à ceux existants, portant ainsi à huit le nombre d’infrastructures sportives capable d’abriter un match du championnat, d’une coupe ou une autre activité liée au football surtout. Sibiti, Djambala, Ewo, Kinkala, Dolisie, Owando, Pointe-Noire et Brazzaville ne doivent pas se plaindre du manque d’infrastructures sportives. Le département de  Brazzaville sera même le plus gâté puisque dans le cadre des 11e Jeux Africains, il s'y construit le plus grand stade du Congo. Le Complexe sportif de Kintélé, avec une capacité de plus de 60 milles places, soit quatre fois plus grand que le stade Massamba-Débat va compter 17 milles places assises. Le point des infrastructures existantes étant fait, l’organe technique qui est la Fédération congolaise de football (Fécofoot) devrait faire preuve de beaucoup d’imaginations pour les mettre en valeur. Autrement, les lourds investissements consentis par l’État seront multipliés par zéro.

Des stades livrés mais pas encore homologués

La Fécofoot a pour  mission, après leur livraison, d'en assurer l’homologation par la Confédération africaine de football (CAF) et la Fédération internationale de football association (FIFA). Selon les règlements de ces deux instances de football, africain et international, les matches internationaux ne peuvent se jouer que dans les stades  qui ont reçu un avis favorable des experts internationaux. Actuellement, les stades susceptibles d’abriter les matches internationaux sont : Alphonse-Massamba-Débat, le Complexe sportif de Pointe-Noire, Denis-Sassou-N’Guesso de Dolisie. Le stade Marien-Ngouabi d’Owando n’a pas encore accueilli un match international. Sur les trois premiers, les observateurs se plaignent de l’état de dégradation de la pelouse qui serait très avancé et occasionné par le manque d’entretien. C'est ainsi que les Diables rouges ont délocalisé leur match à Pointe-Noire à cause de la dégradation de la pelouse du stade Alphonse-Massamba-Débat. Au bord de l'océan, où le onze national livre ses rencontres, Claude Le Roy, l’actuel sélectionneur des Diables rouges, a aussi constaté des anomalies sur la pelouse synthétique.

« On a fait un super match sur un terrain très difficile qui ne permet pas de jouer au football comme on devrait le jouer. C’est une pelouse synthétique indigne du haut niveau international. Il y a de faux rebonds. Ceux qui n’ont pas joué au  football ne peuvent  pas se rendre compte. C’est très difficile pour les joueurs de football qui aiment jouer sur une touche pour pratiquer le football qu’on veut développer. On est obligé de contrôler parce qu’il y a tellement de mauvais rebonds. C’est des terrains qui compliquent les équipes locales dans les matches à domicile », s’indignait Claude Le Roy après la victoire 3-0 contre la Namibie. Même constat au stade Denis-Sassou-N’Guesso à Dolisie.

Alors, quelle pièce de rechanges pour ces trois stades, si l’on n’accorde pas du crédit à d’autres infrastructures existantes ? Des initiatives pour homologuer d’autres stades s’imposent. Les aires de jeu de ces enceintes obéissent à des normes. Leur utilisation fera de telle sorte que le  football  soit vécu partout. L’équipe de France par exemple ne se contente pas de jouer ses matches au stade de France à Saint-Denis (Paris). Elle les joue là où bon lui semble, soit au stade Vélodrome à Marseille, au Parc de Princes à Paris, à Gerland à Lyon, à Geoffroy Guichard à Saint-Étienne, à la Mosson à Montpellier, au Parc Lescure à Bordeaux, etc. De la sorte, tout le pays sent une véritable communion entre l’équipe nationale et les fans les plus reculés, souvent collés à la radio pour suivre des matches de leur équipe nationale.

Une fois donc les stades homologués, l’équipe nationale, ayant trois catégories, pourrait susciter l’admiration de tous en jouant des matches partout dans les départements dans lesquels les stades ont été construits. On ne doit pas en vouloir si Sibiti, Djambala, Owando, Ewo et Kinkala abritent ne fut-ce que des matches amicaux ou internationaux des Diables rouges, peu importe la catégorie. L’idée mettra en valeur les infrastructures construites.

Quelques équipes émergent grâce à ces stades

Cette saison, en coupe du Congo, quelques équipes de l’intérieur du pays ont sorti le grand jeu pour éliminer prématurément les clubs d’élite ultra favoris. En seizièmes de finale de la compétition, en effet, Oyonnax d’Owando a écarté FC Kondzo de la course au titre en l’emportant, 5 à 3, aux tirs au but, après un match de 1-1. L’équipe de Brazzaville qui sortait droit de la Coupe africaine de la Confédération a donc vu noir face à une formation de la Cuvette qui a tiré profit des faveurs du stade Marien-Ngouabi d’Owando pour mieux préparer la compétition au cours de laquelle elle a convaincu par son talent. Même si en huitième de finale Oyonnax n’a pas pu contenir Étoile du Congo qui l’a éliminé à cette étape.

Olympic d’Ewo a, par ailleurs, infligé le même sort à la Jeunesse sportive de Talangaï (JST). L’équipe du 6ème arrondissement de la ville capitale qui croyait facilement obtenir sa qualification en quart de finale a pris une douche froide à Ewo. D’autant plus que le club Olympic de cette localité a éliminé la JST, 3-2, aux tirs but, après le match nul d’un but partout au temps réglementaire. Là encore, il a fallu attendre les huitièmes de finale pour voir l’équipe quitter la compétition.

À dire vrai, si les stades d’Owando et d’Ewo n’existaient pas, ces deux équipes de l’hinterland n’allaient pas atteindre ce niveau de la compétition en prenant le dessus sur les adversaires qui n’étaient pas les moindres.  Ces infrastructures ont été de beaucoup dans la préparation des deux clubs qui ont prouvé à la face du public sportif national qu’ils ont du talent et que désormais le statut d’outsiders leur va de moins en moins bien, car bénéficiant des installations sportives de même qualité que d’autres équipes et parfois même mieux. Olympic d'Ewo et Oyonnax d'Owando ont bien amorcé l'opération de mise en valeur de ses stades qui, en retour leur permet d'améliorer les performances.

En rappel, la localité de Dolisie a été honorée lorsque la fédération décidait de délocaliser le match Diables rouges contre les Léopards de la République démocratique du Congo, comptant pour la qualification à la phase finale du Championnat d’Afrique des nations (Chan). Le Congo l’avait emporté 1-0 et s’était qualifié. La qualification acquise à Dolisie a été saluée par tous les Congolais. Le Club athlétique renaissance aiglon, pourtant une équipe de Brazzaville, avait communié avec le public ponténégrin en allant jouer ses matches de coupe d’Afrique à Pointe-Noire. Diables noirs avaient aussi cette volonté de délocaliser ses matches de la Coupe d’Afrique au stade de Kinkala. Les Diables noirs ne devraient-ils pas  honorer, comme Léopards de Dolisie, cette localité si l’intention des dirigeants n’avait pas été anéantie par un avis défavorable donné à ce stade ?

L’appui des conseils départementaux va compter pour la visibilité

Les stades construits à la faveur de la municipalisation accélérée pourraient, dans un premier temps, se rendre utile en accueillant quelques matches du championnat. Le constat est amer. Il n’y a pas de clubs de football dans ces départements engagés au championnat national, encore moins en Ligue 2, excepté Saint-Michel de Loukoléla qui livre ses matches au stade Marien-Ngouabi à Owando. Les compétitions des ligues n’étant pas aussi régulières, les représentants de ces villes profitent de la Coupe du Congo pour rivaliser avec les grands clubs du Congo dans des stades modernes. D’autres ont essayé au premier tour et n’ont pas réussi à rééditer l’exploit au tour suivant à cause du manque de moyens.

L’appui des cadres et des autorités départementaux s’impose en vue de hisser le département vers le haut. Il n’y a qu’à prendre l’exemple de l’AC Léopards de Dolisie, soutenu par un fils du département, pour voir à quel point le sport, en particulier le football, peut bien vendre l’image d’une localité de l’intérieur du pays. Dolisie est connue partout dans le monde grâce à ses prestations en compétitions internationales africaines (vainqueur de la Coupe de la Confédération en 2012, demi-finaliste en 2014 après que cette équipe a disputé la phase de poules de la Ligue des champions en 2013).

 

 

James Golden Eloué et Rominique Nerplat Makaya

Légendes et crédits photo : 

Photo 1 : Stade de Djambala Photo 2 : Stade d'Owando Photo 3 : Stade Alphonse-Massamba-Débat crédit photo DR