Cobalt : les conditions d’accès de la RDC à un marché en plein boom

Lundi 26 Février 2018 - 19:03

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En février 2018, le constructeur automobile allemand BMW a négocié un contrat d’approvisionnement de dix ans. D’autres grandes marques, dont Volkswagen et Samsung, cherchent également à conclure des contrats similaires pour accompagner la révolution de la voiture électrique. Plusieurs pays arabes du Golf Persique montrent un intérêt de puiser ce précieux métal en Afrique pour concrétiser le projet d’érection des usines pour construire ces engins sur place. Pour la RDC qui assure les deux tiers des approvisionnements du cobalt, une exploitation bien encadrée rapportera plus de 20 milliards de dollars américains (USD) dans les dix ans à venir (source : FEC).

Pour le leader mondial du cobalt, la première grande nouvelle est l’augmentation de l’ordre de 129 % du prix de ce minerai, passant de 30 000 à 70 000 dollars USD la tonne entre 2016 et 2017. Actuellement, l’on parle de plus de 80 000 dollars la tonne, soit le triplement du prix au cours des 18 derniers mois. Cela confirme donc les bonnes perspectives du cobalt dans le monde. La deuxième grande nouvelle est l’intérêt grandissant porté sur les richesses cobaltifères par des acteurs potentiels. À côté d’un grand groupe américain de fabrication d’IPhone comme Apple, les fabricants automobiles se lancent également dans la course, confortés par le boom des véhicules électriques. L’on signale par exemple que le groupe américain chercherait à réaliser un véritable deal sur une durée de 5 ans ou plus pour plusieurs milliers de tonnes de cobalt par an. Jusque-là, il approvisionnait ses batteries d’IPhone et d’IPad avec le cobalt acheté auprès des mineurs par les fabricants de batteries.

Apple est classé comme l’un des plus grands utilisateurs de cobalt au monde. L’arrivée d’un nouvel acteur potentiel va changer complètement la configuration du marché. En effet, les besoins des fabricants automobiles sont plus colossaux que ceux des fabricants d’IPhone, même si ces derniers cherchent actuellement à passer à la vitesse supérieure en révisant leurs contrats avec les mineurs. Ils consomment tout de même le quart de la production mondiale de cobalt. Mais en termes de proportion, l’on estime qu’une batterie d’un véhicule électrique exige mille fois plus de grammes de cobalt raffiné qu’une batterie de smartphone. Par ailleurs, les fabricants d’automobiles cherchent à nouer davantage des contrats sur une durée plus longue. Autre élément de taille, les voitures électriques intègrent le cadre plus vaste des politiques mondiales de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Selon la Fédération des entreprises du Congo (FEC), les constructeurs vont investir près de 50 milliards de dollars USD dans des usines de batteries. Si le potentiel existe bel et bien dans le pays, il revient aux autorités congolaises de le transformer en véritables opportunités pour assurer le développement économique national. Beaucoup de ces nouveaux acteurs ne sont pas prêts à faire des concessions sur la question de la traçabilité du cobalt. Apple n’a pas hésité à publier les noms de ses principaux fournisseurs, et l’entreprise américaine participe activement à la lutte contre le travail des enfants dans les mines de cobalt, un mal qui ronge malheureusement la RDC. Par ailleurs, la FEC fait remarquer que les maisons mères des entreprises minières opérant en RDC, qui ne déclarent aucun dividende au Congo, voient leurs cours de bourse s’envoler. Même pour les pays arabes intéressés à ce secteur, il y a une certaine conditionnalité sur le type de partenariat à mettre en œuvre et la sécurisation des investissements de ces pays. Avec un processus politique très délicat, il faut craindre un refroidissement des ardeurs.

Pour la FEC, la RDC doit prendre conscience du nouveau cycle haussier des matières premières, avec le cobalt en première position. Le pays dispose de 60 à 70 % des réserves mondiales. Il faut déjà penser à financer une prospection à grande échelle pour découvrir d’autres gisements de cobalt. Il est important de profiter au maximum d’un marché porteur avant la découverte d’une alternative au cobalt dans la construction des batteries. Avec une exploitation équilibrée, le précieux métal rapportera au pays entre 20 et 30 milliards de dollars USD dans les dix prochaines années.

Laurent Essolomwa

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