Biens mal acquis : « Le vrai problème n’est pas juridique, il est politique et médiatique », selon Denis Sassou-N'Guesso

Samedi 21 Décembre 2013 - 17:15

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Cette déclaration du président de la République figure dans l’interview exclusive qu’il avait accordée à Paris-Match lors de son dernier séjour en France. Réalisé par Caroline Mangez, cet entretien a permis à Denis Sassou-N’Guesso de donner son point de vue sur d’importants sujets qui dominent l’actualité

L’interview s’ouvre par la crise en RCA que certains prédisent déjà « un bourbier » pour les Français avant d’évoquer d’autres interventions militaires de la France en Afrique, l’insécurité qui gagne le continent avec, en toile de fond, la montée de l’islamisme radical. Denis Sassou-N’Guesso a souligné l’anarchie et la désorganisation des milices en Centrafrique. Il s’est appesanti sur le « parcours confus » de la RCA depuis cinquante ans, « toujours en étroite relation avec la France ». Des questions qui renvoient indubitablement à la fameuse Françafrique tant décriée. Et le président congolais de répondre : « On peut dire que la Françafrique a été mauvaise, encore faut-il initier une nouvelle relation qui sera meilleure. »  

Autres questions abordées dans cet entretien : l’avenir économique du continent noir et le rôle majeur que joue la Chine. « Ce pays nous prête à des taux préférentiels. En retour, il est normal qu’il nous propose ses entreprises », a répondu Denis Sassou-N’Guesso, qui a avoué « être un socialiste hybride, issu du communisme primitif » lorsque la journaliste lui a demandé « ce qui restait en lui du militant marxiste du Parti congolais du travail ».

À propos du pétrole, le président congolais, qui reconnaît que la source peut tarir, a exposé sur la diversification de l’économie congolaise. « Nous avons 342 000 kilomètres carrés de terres agricoles disponibles, des réserves forestières, de minerais, de l’eau, du soleil et de la main-d’œuvre, donc de vastes possibilités » susceptibles d’attirer des investisseurs et de garantir l’émergence du pays. 

Incontournable dans cette interview, la lancinante question des biens mal acquis, à laquelle Denis Sassou-N’Guesso a répondu sans emphase en évoquant des ratés dans l’instruction l’affaire. « C’est la raison pour laquelle nous allons saisir la justice internationale », a-t-il lancé au milieu d’un argumentaire qu’il conclut en affirmant que « le vrai problème n’est pas juridique, il est politique et médiatique ».

Dans une autre répartie, Denis Sassou-N’Guesso a fustigé l’attitude de la justice et de la police françaises qui poussent loin leur action en allant fouiller dans les comptes et dépenses des membres de sa famille. Et de lancer : « Les Russes et d’autres, les pays du Golfe notamment, rachètent tout Paris et même bientôt vos banlieues je crois, et personne ne vient crier au scandale. » Il s’agit là d’une action ciblée parce que l’Afrique est faible. « Ce ne sera pas toujours le cas », a-t-il promis.

L’interview met également l’accent sur le rôle du Congo dans la libération de l’Afrique australe, avec la célébration des 25 ans du protocole de Brazzaville que d’aucuns feignent d’ignorer. La capitale congolaise qui cristallise l’attention à cause des restes mortels de Pierre Savorgnan de Brazza. Faut-il oui ou non les renvoyer ? « Nous garderons ses cendres et invitons ceux qui veulent s’y recueillir à venir nombreux. » Autrement ce serait « une honte pour l’histoire ».

L’interview s’achève sur une question qui agite la classe politique congolaise : envisagez-vous votre succession ? « Ce n’est pas à l’ordre du jour », a conclu Denis Sassou-N’Guesso, dont la photo qui accompagne l’interview le présente assis et de profil, en chemise et cravate.

La rédaction