Interview : Martin Kayembe : « Ça coûte moins cher de fidéliser un client que d’en trouver un nouveau »Mercredi 22 Juillet 2015 - 14:15 Actuellement en forte croissance à Kinshasa, les PME sont un secteur important du développement auquel le Fonds pour l’inclusion financière en RDC (FPM) accorde un appui nécessaire pour son meilleur épanouissement. Organisée en fin juin dernier dans cet ordre, la cinquième édition de son Forum accès au financement (FAAF) s’était articulée autour de quatre thèmes. La communication de Martin Kayembe, donnée en réponse à la question Comment fidéliser son client ?, avait rencontré l’assentiment général des participants, à savoir près de quatre cent entrepreneurs. Dans les détours de l’interview accordée aux Dépêches de Brazzaville l’expert explique l’intérêt de cette matière pour les PME. Les Dépêches de Brazzaville (LDB) : Comment pourrait-on vous présenter à nos lecteurs ? Martin Kayembe (MK) : Je suis Martin Tshibamba Kayembe, titulaire d’un master en économie appliquée et ancien consultant pour de grandes sociétés dans les Big Five en Europe. Depuis mon retour au Congo voici treize ans, j’ai été tour à tour directeur général de la Bralima au Katanga, premier directeur régional de Celtel (l’actuel Airtel) pour le Katanga et les deux Kasaï. Puis, je me suis lancé dans la consultance, actuellement j’œuvre comme formateur en entreprise pour tout ce qui concerne le management, le leadership et le coaching, principalement pour le compte de Crownlink, j’offre aussi mes services à certaines autres sociétés. Mes formations ont un lien étroit avec le perfectionnement des cadres des entreprises. LDB : Plusieurs entreprises disent faire face à une carence de main-d’œuvre qualifiée à plusieurs niveaux. Quel est votre avis à ce sujet ? MK : Ce n’est pas toujours facile de trouver le bon candidat pour un poste donné parce que très souvent, l’on ne fait pas un job description bien approfondi sur ce que l’on veut vraiment et quel candidat on veut. Et, malheureusement, ici chez nous, l’on a tendance à faire confiance aux gens que l’on connaît. L’on ne fait pas spécialement cas de la compétence mais l’on s’attache au facteur confiance. C’est un problème relativement fréquent. L’on a tendance à se dire : « C’est mon cousin, il sera à même de me rendre service en toute confiance plutôt que quelqu’un que je ne connais pas ». Ce n’est pas pour autant que le cousin a les compétences qu’il faut pour le poste pour lequel on l’engage. C’est encore plus particulier dans les PME parce qu’elles sont souvent dirigées par des gens qui se sont battus tout seul, qui n’ont pas spécialement une grande formation, qui ont construit une entreprise en partant du principe qu’ils ne seront mieux qu’avec des gens qu’ils savent maîtriser, éventuellement qu’ils connaissent. Et alors, du coup, l’on a tendance à engager des gens qui n’ont pas toujours la compétence requise. Les sociétés qui ont compris cet aspect des choses investissent dans les formations. C’est pour cela que je me suis plus ou moins dirigé vers ce secteur-là parce que je pense pouvoir donner quelque chose à nos compatriotes du fait de mon expérience et de mes compétences. LDB : Quels genres d’entreprises sollicitent souvent votre expertise ? MK : Pour le moment, c’est plus les banques. J’ai l’impression qu’elles ont tendance à vouloir former, améliorer leur service sans doute à cause de la concurrence qui est en train de s’implanter fortement dans le pays. La formation est plus centrée dans le domaine du management et du leadership. Beaucoup de cadres ont besoin d’affirmer leur leadership et leur qualité de coaching. Je fais également du coach en entreprise, ce sont principalement les grandes entreprises et les banques qui investissent dans ce domaine-là, mais il y a moyen de faire la même chose pour les PME. Je suis souvent abordé pour faire du coaching, enseigner, donner des formations en management et en leadership. Le reste, à savoir tout ce qui est attitude, le service à la clientèle, service après-vente et fidélisation du client, c’est également un aspect qui m’intéresse beaucoup. J’aime bien cet aspect-là qui a trait au service clientèle, il est bon d’apprendre à ses collaborateurs à mieux servir les clients. Fidéliser les clients est important à mes yeux. LDB : Lors du Forum accès au financement destiné aux PME vous avez mis l’accent sur la fidélisation du client, pourquoi ? MK : Cet aspect a toute son importance car j’ai l’impression que nos compatriotes ont tendance à fonctionner avec le one shot. Dans ce cas, tout ce qui importe c’est qu’un client entre dans le magasin et achète la marchandise vendue, un peu comme au marché. Alors que l’idéal c’est de s’assurer qu’une fois parti, il revienne encore s’approvisionner. Ça coûte moins cher de fidéliser un client que d’en trouver un nouveau. Il y a l’aspect accueil qui est souvent négligé dans les magasins. On ne le maîtrise pas toujours parce que l’on fonctionne naturellement alors que pour faire de bonnes affaires, il faut mettre en place une stratégie d’accueil et trouver comment faire du client le roi qu’il est. Et le roi doit être servi. Il est important que nos PME commencent à réfléchir au fait qu’il faut fidéliser les clients. Un certain nombre d’entre eux va revenir tout le temps s’ils aiment votre cadre, vous allez continuer à faire du chiffre. Je me suis rendu compte que cet aspect est totalement négligé chez nous. Le service client ne fonctionne pas comme il faut même dans les grandes entreprises. Les clients sont accueillis comme s’ils venaient quémander quelque chose alors qu’ils viennent dépenser leur argent dans votre magasin. L’aspect du client-roi est assez négligé tout autant que celui du service après-vente. Une fois que le client est sorti du magasin, il est déjà oublié. Alors, j’ai participé à ce forum pour faire comprendre aux entrepreneurs que le fait d’avoir un certain nombre de clients fidèles est une richesse. LDB : Quel est le principe-clé de la fidélisation qui marche à tous les coups ? MK : Il faut que le client revienne à tout prix et pour cela, il faut lui donner certaines choses. À commencer par l’accueil. Lorsqu’il est bien accueilli, on l’écoute et on est sûr de lui donner ce qu’il attend de nous, il y a des chances qu’il soit satisfait. Des fois, le client entre dans un magasin ne sachant pas trop ce qu’il cherche parce qu’il a vaguement une idée de ce qu’il veut. S’il trouve quelqu’un qui le conseille convenablement et arrive à lui donner le produit, lui rendre le service à même de résoudre son problème immédiatement, il y a des chances que ce client soit conquis. Si, en plus, il y a un service qui va avec, si en plus on essaie de savoir si cela s’est bien passé, il y a des chances que ce client revienne. Et, pour moi, le principe le plus important dans le service à la clientèle, c’est que le client revienne.
Nioni Masela Légendes et crédits photo :Photo : Martin Kayembe Notification:Non |