Justice et banque : enjeux et atouts de la coexistence dans la CémacJeudi 20 Juillet 2017 - 12:30 À l’initiative de la Commission bancaire d’Afrique centrale (Cobac) et de la Banque des Etats d’Afrique centrale (BEAC), quelque 300 participants constitués des praticiens du droit, des banques et spécialistes de la microfinance se sont réunis le 19 juillet dans la capitale tchadienne autour d’un forum en vue d’échanger sur les moyens d’améliorer les relations parfois conflictuelles entre les juridictions et le secteur bancaire. Organisé sur le thème : « Justice et Banque dans la Cémac », ce forum, le premier du genre vise le traitement pédagogique de trois enjeux liés à la place du droit et de la justice dans les activités bancaires. Il permet d’évoquer de façon globale certaines difficultés qui empêchent le bon fonctionnement des économies de la zone Cémac. « Ce forum est non seulement une opportunité offerte aux professionnels de la justice et de la banque pour échanger sur l’interprétation de la règlementation bancaire et du droit des affaires, mais également un lieu de partage d’expérience dans ces domaines respectifs », a précisé le ministre tchadien des Finances et du budget, Christian Georges Diguimbaye, à l’ouverture des travaux. En effet, les concepts justice et banque étant considérés comme des maillons essentiels de toute société moderne, le forum est perçu, par les spécialistes de ces deux entités, comme une occasion d’échanger sur les problématiques qui peuvent entraver le secteur bancaire à l’heure où la sous-région d’Afrique centrale connait une situation économique et financière difficile marquée par la chute des prix de pétrole au niveau mondial. Faisant état à l’insuffisance de l’investissement productif, malgré l’expansion du secteur bancaire ces dernières années, le président de la Cobac, Abbas Mahamat Tolli a épinglé les facteurs justifiant cet état de chose dans la Cémac où 127 cas de litiges ont été enregistrés ces quatre dernières années, avec un volume de créances irrécouvrables de l’ordre de 17%. Au nombre des causes, a-t-il souligné figurent, l’incertitude sur le dénouement juridique des contrats ; l’application souvent problématique des lois et règlements au détriment des établissements bancaires de crédit, mais aussi les lourdeurs des procédures juridiques auxquelles s’ajoute l’insuffisance du nombre des magistrats spécialisés dans le traitement des contentieux bancaires. « Tous ces obstacles obèrent la capacité liée au recouvrement des créances et à la réalisation des sûretés présentées en couverture des prêts », a déclaré le président de la Cobac. En vue d’un meilleur échange d’expérience entre les deux entités, trois panels animés aussi bien par des banquiers et des juristes ont permis de passer en revue les difficultés d’ordre juridictionnel auxquelles se heurtent les établissements de crédit et de la microfinance à la règlementation édictée dans le cadre des litiges avec les clients. Vers une quête d’une meilleure cohabitation entre justice et banque Trois thématiques à savoir « Imbrications entre le droit des affaires et droit bancaire » ; « le Cadre juridique des relations entre banque et leurs clients », et « les concours de compétence entre les juridictions nationales et communautaires » ont été au cœur de trois panels animés par des professionnels de haut niveau. Si le premier panel a permis aux participants de se faire une large vue à la fois du cadre juridique général fixé par les actes uniformes aux établissements de crédit et de microfinance, il a également été présentés les enjeux et atouts de cette coexistence des ordres juridiques nationaux ou communautaires dans la Cémac et la prise en compte des spécificités liées à l’activité bancaire dans le processus législatif de l’Ohada. Quant à la deuxième thématique, elle a mis en lumière les relations entre les banques et leurs clients. Il s’agit notamment de l’existence de l’arsenal juridique dans la Cémac pour un règlement de litiges entre les clients et les banques souvent victimes des exécutions de décisions de justice. Ainsi, évoquant le cas de Orabank, il s’est dégagé, pour une certaine opinion, la nécessité de réfléchir au niveau de la sous-région Cémac, sur la nécessité d’un cadre d’intégration réunissant les autorités juridiques et financières pour sauver les banques. Car, estime cette opinion, la qualité de la justice est l’une des causes du mauvais classement des pays d’Afrique, en général, au classement de Doing business de la Banque mondiale. Consacré aux concours de compétence entre les juridictions nationales et communautaires en matière de contentieux, le troisième panel a permis une mise en relief des conflits de compétences entre les juridictions nationales et communautaires, d’où l’appel à la mutualisation des efforts des institutions de la Cobac au niveau des institutions judiciaires, lancé par Abbas Mahamat Tolli. La Cobac en bref Créée le 16 octobre 1990 en raison des faillites bancaires de la fin des années 80, la Commission bancaire de l’Afrique centrale (Cobac) est un organe de la Cémac avec pour mission de veiller à l’intégration du système bancaire et d’en garantir la résilience. Elle est également chargée de veiller au respect par les établissements de crédit des dispositions législatives et réglementaires édictées par les autorités, la Banque centrale et de sanctionner les manquements constatés. La Cobac compte onze commissions désignées par le Comité ministériel pour leur compétence en matière bancaire, financier ou juridique. Elle se réunit au moins deux fois par an et les décisions y sont arrêtées à la majorité des deux tiers des voix exprimées. Guy-Gervais Kitina Légendes et crédits photo :Une vue des participants à l"ouverture du forum; Photo de famile des officiels après l'ouverture du forum; Un panel de haut niveau Notification:Non |