Utexafrica, Cilu, Sotexki, … : l’industrie congolaise au plus malMardi 14 Juin 2016 - 14:15 En mai 2016, la Cimenterie de Lukala (Cilu) annonçait l’arrêt de la production du ciment gris en raison d’une impitoyable concurrence angolaise qui l’a contrainte d’ailleurs à fonctionner en-deçà de 50 % de sa capacité installée. Actuellement, Kinshasa et le Kongo central sont tributaires du ciment et même des produits alimentaires en provenance d’Angola. Des années plus tôt, c'était l’industrie textile congolaise qui sombrait face à l’avancée de la Chine et de l’Inde. Selon les tout derniers chiffres disponibles, les industries locales tournent autour de 37 % de leurs capacités installées et créent environ 5 % d' emplois en RDC, contre 71 % pour le secteur primaire, 15 % pour le commerce et 9 % pour les services (Rapport INS 2015). Depuis 2007, la RDC ne fabrique plus de wax. C’est la conséquence, entre autres, de la fermeture progressive de ses unités industrielles qui ont contribué jadis à la compétitivité du pays dans ce secteur dans les années 1970 et 1990. Mais les 7 usines textiles, en l’occurrence Utexafrica, CPA, Solbena, Sotexki, Syntexki, Fitiaf et Novatex, ont quasiment disparu et sont en voie de l'être. Les 3 usines à résister à la vague déferlante étaient: l’Utexafrica (Kinshasa); la Sotexki (Kisangani) et la Syntexki (Lubumbashi). Actuellement, seule la Sotexki, une des grandes industries de la région, continue d’enregistrer des commandes régulières des gouvernements de certains pays voisins comme l’Angola, le Congo-Brazzaville et le Zimbabwe. Aussi, la production du textile a-t-elle baissé de 83 % entre 1990 et 1996. Toutes les initiatives locales pour relancer l’industrie textile congolaise n’ont pas apporté des résultats probants. Au-delà, l’on déplore également la triste situation de la culture du coton, avec une production estimée à moins de 10 000 T contre 800 000 T pour le Burkina Faso. La situation de la Cilu suscite également des réactions diverses. Créée en 1921, l’ancienne Société des ciments du Congo devenue plus tard « Cilu » traverse une situation très difficile et, sans doute, similaire à la tristement célèbre Utexafrica aujourd'hui disparue. La crise qui frappe le secteur de la cimenterie ne peut qu’étonner avec l’explosion des chantiers à travers les principales villes du pays. Les besoins locaux en ciment ont dépassé 1,5 million T par jour. La Cilu n’arrive qu’à couvrir moins du tiers. Si les importations sont indispensables, du moins à ce stade, elles doivent être mieux encadrées pour éviter de tuer la production locale. En effet, le ciment importé d’Angola inonde le marché local, et annihile tout l’effort de relance de la production de la Cilu conduite lentement mais sûrement vers la faillite. En plus d’être vendu à des prix très bas, le ciment angolais est de bonne qualité. Pour nombre d’experts, en plus d’un investissement obligatoire du gouvernement pour baisser les coûts de fabrication et augmenter la production de la Cilu et d’autres cimenteries actives dans le pays, les autorités congolaises ne doivent pas hésiter à mettre en œuvre une politique protectionniste. Déjà, l’on apprend que le gouvernement a décidé d’une exonération des taxes pour la Cilu. "Un pas dans la bonne direction", a confié un expert à la rédaction, mais "il est indispensable d’aller plus loin pour sauver l’industrie du ciment", a-t-il poursuivi. Investir d‘urgence Dotée de la capacité d’influencer tous les autres secteurs de l’économie et de créer le plus d’emplois, l’industrie congolaise est bien en péril. Mais 2016 s’annonce une année d’opportunités pour les entreprises tant locales qu’africaines. En effet, a fait remarquer l'expert, il y a la constitution progressive d’une classe moyenne africaine plutôt solide. Les dépenses de consommation de cette catégorie socio-économique vont continuer à s’accroître. Dans l’ensemble, l’Afrique devrait représenter 3 % de la consommation mondiale d’ici à 2030, avec des projections de dépenses de consommation estimées à 2 200 milliards de dollars US contre 680 milliards en 2008. Dès lors, il faut une bonne évaluation des nouvelles attentes des consommateurs, une adaptation de l’offre et une lutte effrénée contre tous les maux qui rongent l’industrie locale. les autorités du pays doivent s'adonner à ce petit exercice de réadaptation pour occuper un meilleur positionnement dans la région. Le grand défi est d’arriver à enrayer le vent de désindustrialisation qui a commencé à souffler de manière destabilisante depuis les pillages des années 1990. Au-delà, il y a aussi le manque d’incitation et d’accompagnement financier. Cette désindustrialisation a eu pour conséquence de faire passer le nombre d’industries de 1800 à seulement une centaine entre 1960 et aujourd’hui. Dans les milieux des affaires, l’on insiste sur l’urgence de renforcer les centres de compétitivité dans les secteurs clés comme la pharmacie, l’agroalimentaire, les plastiques, les équipements industriels, l’industrie de matériaux et de construction (ciment, bitume, métallurgie). Il faut arriver à consolider le label « made in Congo ». D’où l’intérêt de faire de la révolution industrielle une priorité nationale. Laurent Essolomwa Notification:Non |