Rencontre Joseph Kabila - Étienne Tshisekedi : des signes avant-coureurs

Samedi 12 Octobre 2013 - 16:00

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De plus en plus des voix se font entendre pour en appeler au rapprochement entre les deux ex-challengers de l’élection présidentielle de 2011 qui ont intérêt à mettre en sourdine les extrémismes de leurs camps respectifs pour n’écouter que la voix de leur propre raison les astreignant à oeuvrer à l'unissons, au-délà des clivages qu'impose la démocratie classique afin d'éloigner le spectre de la balkanisation qui plane sur le pays.  

À la veille de la prestation de Joseph Kabila devant les deux chambres législatives réunies en congrès d’où il est censé donner une suite aux recommandations découlant des concertations nationales, le suspense reste toujours entier en rapport avec les « décisions importantes » qu’il avait annoncées à la clôture de ce forum. L’on se perd en conjecture sur son discours qui suscite aussi bien des interrogations dans le chef des acteurs politiques de la majorité que de ceux de l’opposition. Le suspense sera levé sans doute le 15 octobre avec, à la clé, les grandes orientations en rapport avec la formation d’un gouvernement de large ouverture dont le principe est déjà acté. Mais l’enjeu de la cérémonie consistera, pour Joseph Kabila, à rencontrer les attentes des Congolais en rapport avec leurs aspirations au mieux-être sur fond d’une cohésion nationale cimentée, renouvelée et requinquée.

Mais, comme le font observer maints analystes, il y a un prix à payer pour donner corps à cette perspective censée contrer toute velléité de balkanisation du pays nourrie par les ennemis du peuple. Cette cohésion nationale ne pourra, en effet, se concrétiser sans impliquer quelques personnalités politiques demeurées en marge de cette dynamique parce que considérées par le pouvoir en place  comme des pestiférées. De plus en plus des voix se font entendre pour en appeler au rapprochement entre les deux challengers de l’élection présidentielle de 2011, en l’occurrence, Étienne Tshisekedi et Joseph Kabila. On ne le dira jamais assez, la crise politique dont souffre la RDC présentement gravite autour de ces deux personnalités pour autant qu’elles n’ont toujours pas le même entendement par rapport aux résultats de la présidentielle de 2011 tels que publiés par la Céni, avalisés par l’un et récusés par l’autre.

Les indices de dégel

En s’autoproclamant « président de la République » tout en embarquant dans sa logique contestataire une frange importante de l’opinion et de la classe politique, Étienne Tshisekedi avait exacerbé la tension sociale et jeté le discrédit sur un processus électoral qui, pourtant, avait requis l’aval des observateurs internationaux. Cloitré dans son opiniâtreté à réclamer « la vérité des urnes », le Sphinx de Limete s’est muré dans sa tour d’Ivoire au point de nuire aux intérêts de ses proches collaborateurs dont certains se sont démarqués en siégeant à l’Assemblée nationale. De son côté, le pouvoir n’est pas allé de main morte pour étouffer toutes les manifestations de l’UDPS de plus en plus vindicative et excitante. C’est dans ce contexte de tiraillement constant entre les combattants de l’UDPS et les forces de l’ordre qu’ont évolué les rapports entre le pouvoir en place et l’opposition ultra extrémiste basée à la 10e Rue Limete. Depuis quelques temps, des signes de dégel se font jour. La levée récente des barrières autour de la résidence d’Étienne Tshikedi a permis de décrisper le climat politique entre le fief de l’irréductible opposant et le palais de la Nation tout en jetant une passerelle dans la perspective d’un rapprochement.

C’est non sans raison qu’un émissaire de Joseph Kabila, en la personne de l'ambassadeur Théodore Mugalu, chef de la maison civile, a été dernièrement reçu en audience par Étienne Tshisekedi. Un entretien revêtu du sceau du secret mais qui augure des lendemains meilleurs quant aux relations entre les deux ex-challengers à la présidentielle de 2011 condamnés, d’après une certaine opinion, à s’entendre au nom de l’intérêt supérieur de la Nation. « Il n’est par exclu de voir Kabila et Tshisekedi se parler, étant tous congolais », s’est contenté de dire le secrétaire général de l’UDPS tout en écartant la perspective d’une  rencontre au sommet entre les deux personnalités en cette phase d’évolution politique du pays. Cette rencontre a néanmoins permis de poser les jalons de la réconciliation nationale censée commencer quelque part.

Possible tête-à-tête

Joseph Kabila et -Étienne Tshisekedi que rien ne divise fondamentalement, si ce ne sont les revendications électoralistes, devraient mettre en sourdine les extrémismes de leurs camps respectifs pour n’écouter que la voix de leur propre raison les astreignant au rapprochement sans lequel la RDC sera divisée et livrée à la merci de prédateurs étrangers de tout bord. « Que gagneraient les deux personnalités en vivant dans cette posture de rupture si ce n’est offrir une opportunité aux envahisseurs rwandais de s’installer durablement en RDC par la biais du M23 en capitalisant les fissures au sein du leadership politique congolais ! », s’exclame un membre de l’opposition parlementaire. Le fait pour Étienne Tshisekdi de justifier d’une base sociologique importante en fait automatiquement un acteur majeur dans la résolution de la crise politique en RDC d’autant plus que son parti est aujourd’hui classé en ordre utile comme deuxième force politique du pays.

Tout à présent réside dans la manière de concrétiser ce qui n’est encore qu’un vœu, à savoir l’embarquement d’Étienne Tshisekedi dans le bateau de la cohésion nationale qui mouille déjà dans les eaux de la réconciliation nationale ! Après l’audience accordée par le Sphinx de Limete à l’émissaire du chef l’État mardi dernier, il faudrait passer à l’Acte II en balisant le chemin vers un tête-à-tête Joseph Kabila-Étienne Tshisekedi. Chose inimaginable il y a peu, une telle perspective appartient désormais du domaine du possible au regard des enjeux sociopolitiques de l’heure qui requièrent plus de cohésion en interne afin de faire face aux menaces de balkanisation. 

En s’inscrivant dans cette logique de rapprochement, une question reste toutefois pendante : comment concilier la thèse d’Étienne Tshisekedi qui a toujours récusé la légitimité des institutions en faisant prévaloir son crédo lié à la vérité des urnes et le besoin de l’impliquer dans une gestion consensuelle de l’État au nom de l’impératif de la cohésion nationale ? Un véritable nœud gordien.  Les prochains jours nous en diront davantage.            

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Photo 1: Joseph Kabila, Photo 2: Etienne Tshisekedi