Processus électoral. Jacques Djoli : « Il faut reconnaître que l'on fait une navigation à vue »

Mercredi 5 Juillet 2017 - 18:11

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Ancien vice-président de la Commission électorale nationale indépendante (Céni), le sénateur Jacques Djoli qui suit de près le processus électoral en RDC apporte un regard critique sur le déroulement des opérations d’enrôlement sur l’ensemble du territoire national en plaidant notamment pour l’intégration du Kasaï dans la dynamique électorale en cours.      

Le Courrier de Kinshasa : Nous sommes aujourd’hui au début du second semestre alors que l’accord de la Saint-Sylvestre prévoit la tenue des élections avant fin décembre 2017. Quelle chance donnez-vous à l’organisation desdites élections ?

Jacques Djoli : L’accord du 31 décembre 2016 devait être complété par les arrangements particuliers qui, malheureusement, ont pris beaucoup de temps. L’accord en lui-même contenait des indications pour que nous puissions tenir - ce qui est déjà difficile -, la date du 31 décembre 2017. Apparemment, de la part de la structure chargée de l’organisation des élections et de certains acteurs politiques, tout n’a pas été mis en œuvre pour produire un calendrier qui devait reprendre l’ensemble des opérations de manière à tenir cette échéance. Aujourd’hui, il y a des interrogations. À ces interrogations techniques, il y a des paramètres sécuritaires et autres politiques qui interviennent. Ce qui fait qu’il faudra rapidement que nous puissions nous retrouver dans le cadre de concertations techniques pour déterminer cette date.

LCK : D’autres personnes estiment qu’on ne peut pas aller aux élections sans les provinces du Kasaï et le Kasaï central. En d’autres termes, il faudrait d’abord pacifier cette partie de la République avant d’envisager toute opération d’enrôlement. Qu’en dites-vous ?

JD : C’est vrai qu’il ne faut pas imaginer la tenue des élections sans la participation de la partie centrale de la RDC qu’est le Kasaï. Mais il ne faut pas tout simplement le dire. On a pu enrôler le nord et le sud Kivu bien qu’il y ait une violence assez endémique avec le règne des groupes armés. Il faudra se donner des moyens pour que nous puissions effectivement enrôler la Kasaï et ne pas être totalement bloqués mais trouver des solutions idoines pour l’intégrer dans la dynamique en n’hypothéquant pas l’ensemble du processus électoral.

LCK : Combien de temps devrait prendre la pacification de cette zone ?

JD : Je ne suis pas dans les opérations militaires, mais je crois qu’il y a un mouvement d’apaisement. Le chef de l’État a effectué une visite dans ces provinces. Il faut que l’ensemble des leaders du Kasaï, la Céni et la communauté internationale, notamment la Monusco, puissent se retrouver dans une sorte de séminaire ou de rencontre qu’on appellerait par exemple la Conférence sur le Kasaï pour que rapidement, nous puissions voir ce qu’il faudra faire si le problème du Kasaï est réel.

LCK : À Kinshasa, le processus d’enrôlement connaît d’énormes difficultés…

J.Dj : Nous n’arrivons pas à expliquer pourquoi un certain nombre d’hésitations ou de ralentissements dans la ville de Kinshasa où on a commencé par quatre communes et puis, finalement aujourd’hui, sur 916 bureaux, il y a toujours des plaintes sur la lenteur des opérations d’enrôlement des électeurs alors que Kinshasa devait capitaliser toutes les difficultés rencontrées ailleurs. Ici, on a des informaticiens. On n’a pas de problème de mobilité comme à l’intérieur du pays.   Donc, je crois qu’il faut que nous tous nous puissions faire preuve de bonne volonté en prenant en compte le fait qu’une opération électorale est une opération complexe qui est à la fois politique, mais aussi technique.  Et que nous fixions à partir d’un calendrier d’abord des opérations électorales en cours et à venir, et ensuite les autres opérations, c’est-à-dire la remontée des données, le nettoyage des fichiers. Et quelle que soit la date, sans fétichisation des dates, nous devons avoir un calendrier prévisionnel. Malheureusement, il faut reconnaître que l'on fait une navigation à vue. On ne sait pas si ce sera en décembre 2017, on ne sait pas si ce sera en avril 2018 ou en 2019 comme le disent certains. Donc, tous ces éléments-là, toutes ces imprécisions ne peuvent qu’éroder la légitimité et créer des frustrations qui remettent en cause la stabilité même de la République.                 

 

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Jacques Djoli Eseng'Ekeli

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