Opposition : de grosses fissures dans l’édifice

Lundi 27 Novembre 2017 - 15:11

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Habitué aux affrontements récurrents à l’intérieur de son camp, le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement est au bord du précipice, miné par des divisions internes qui l’ont davantage affaibli et relativisé ses chances en perspective de prochaines joutes électorales. 

Depuis le 5 novembre, le calendrier électoral tant réclamé par l’opposition et la communauté internationale est disponible. Il a le mérite de fixer, de manière claire, un échéancier en rapport avec les opérations électorales restantes jusqu’à la tenue, en décembre 2018, des scrutins présidentiel et législatifs. Plutôt que de soutenir un tel chronogramme tendant à offrir au pays la chance de négocier un passage pacifique du pouvoir via des élections réellement démocratiques, l’opposition est dans un autre schéma, celui de la déstabilisation et de l'insurrection populaire susceptible de chambouler les acquis d’un processus réputé laborieux dans sa mise en œuvre. De quoi se demander si cette opposition est vraiment prête à aller aux élections.

Emiettée et empêtrée dans ses contradictions, l’opposition a du mal à transcender ses profonds clivages pour parler d’une même voix. De sorte qu’aujourd’hui, tout projet de coalition censé cristalliser ses efforts autour d’un combat unique pour l’alternance à travers une approche commune, procède d’un leurre. Ses choix politiques sont toujours sujets à controverse entre ses différents regroupements affiliés avec, à la clé, des intérêts souvent divergents exacerbés par un problème d’égo très accentué entre ses leaders.       

Le Rassemblement, la principale plate-forme de l'opposition, ploie actuellement sous le poids écrasant des querelles intestines qui ont viré à une guerre des clans. La réforme opérée en son sein, avec notamment les nominations de Félix Tshisekedi et de Pierre Lumbi respectivement comme président politique et président stratégique du Conseil des sages, n’a fait qu’exacerber la division et accentuer le clivage. Désormais, deux pôles concurrents, celui de Limete conduit par le tandem Tshisekedi-Lumbi et celui de Kasa-Vubu piloté par le duo Joseph Olenghankoy-Bruno Tshibala revendiquent le leadership de cette mégastructure écartelée entre deux blocs antagonistes. D’un côté, le Rassop/Limete constitué de la Dynamique, du G7, de l’UDPS, de l’Alternance pour la République ainsi que d’autres partis politiques et associations issues de la société civile. De l'autre, on retrouve quelques cadres de l’UDPS, la coalition des alliés de Tshisekedi, le G14 et d’autres structures réfractaires anti-réformistes à la solde de Joseph Olenghankoy.  Une situation qui a fini par saper les fondements de l’unité de cette plate-forme de l'opposition.  

Candidat unique, choix cornélien

Face aux défis politiques et électoraux qui pointent à l'horizon, à savoir la présidentielle de 2018, il va sans dire que l’opposition peine à se choisir un candidat unique et à gérer l’avalanche d’ambitions qui sortiront éventuellement de ses rangs. Si pour la Dynamique, le G7 et l’Alternance pour la République qui continuent à cheminer avec le Rassop/Limete, Moïse Katumbi demeure le meilleur cheval sur lequel il faudrait miser pour la présidentielle, l’UDPS entend jouer sa propre partition, estimant qu’il serait contreproductif et à la limite humiliant pour elle d’être à la traîne de l’ex-gouverneur du Katanga. En tant que première force politique de l'opposition, ce grand parti historique entend aligner son propre candidat-président de la République plutôt que de se placer sous la coupe d’une plate-forme électorale avec un candidat non issu de ses rangs.

Ce qui pose une sérieuse gestion d’ambitions dans cette méga plate-forme de l'opposition avec, en toile de fond, le flou persistant autour du « deal » que se seraient passés Félix Tshisekedi et Moïse Katumbi. En effet, les deux hommes qui entretiennent une relation politique de circonstance pour conquérir le pouvoir et faire partir Joseph Kabila, se disent complémentaires dans leur action sans indiquer clairement qui, le moment venu, va s’effacer au profit de l’autre lors du challenge présidentiel. Si aujourd’hui leur alliance de façade tient encore le coup, le jour viendra où le candidat déclaré à la présidentielle, Moïse Katumbi, et le prétendant virtuel, Félix Tshisekedi, vont se disputer le leadership de l‘opposition et incarner, chacun en ce qui le concerne, l’alternative crédible face au pouvoir kabiliste.

Entre temps, d’autres forces politiques de l’opposition sont en embuscade, prêtes à jouer les trouble-fêtes. C’est notamment le cas du Front citoyen pour la République avec le MLC en tête et surtout, le parti Lumumbiste unifié (Palu) qui, soucieux de préserver leur autonomie face aux velléités dominatrices de leurs partenaires politiques, pourront aussi se mettre en ordre de bataille dans la course à la présidence. Et que dire alors de l’opposition issue de l’accord du 18 octobre avec l’UNC en tête de lice, de l’opposition républicaine de Léon Kengo wa Dondo aujourd’hui divisée et d’autres regroupements politiques proches de l’opposition qui sont aussi en droit de postuler à la présidentielle, à défaut de souscrire à une plate-forme électorale ! 

A tout prendre, l’opposition congolaise part déjà presqu’alanguie dans la course à la présidence. Ses difficultés à présenter un candidat unique est symptomatique de son désappointement  face à une majorité présidentielle requinquée et cohérente qui a tout l’air de maîtriser l’enjeu électoral.  

              

  

 

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Un groupe d'opposants s'exprimant après une réunion

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