La gestion du patrimoine immobilier et mobilier de l’État pose problème

Jeudi 9 Janvier 2014 - 17:34

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En dépit des textes et lois initiés par le gouvernement pour sécuriser et règlementer la gestion du patrimoine privé et public de l’État congolais, les biens mobiliers et immobiliers constituant le domaine de l’État sont en proie à une spoliation organisée par certains citoyens. Des voix discordantes entre différentes institutions sur la gestion de ce patrimoine public et privé laissent certains observateurs perplexes  

La question demeure d’actualité et constitue, selon le gouvernement, l’un des axes clé en attente d’une solution adéquate en 2014. D’autant plus qu'un État qui ne dispose pas de biens propres et qui est pauvre en patrimoine ne peut pas se développer. D’après les statistiques et les données issues des services de la direction centrale des logements et bâtiments (DCLBA) ainsi que celles de la direction générale du domaine de l’État, outre les nouveaux logements en cours de construction, dans le domaine privé de l’État, le nombre actuel de logements recensés dans tous les départements n’atteint pas un millier. Cependant, celui des propriétés ou immeubles qui font corps avec les logements serait moins de six cents.

L’importance du sujet s’illustre également par les dispositions prises par la présidence de la République qui, à travers une lettre de mission N°00045 du 16 mars 2013 initiée dans le cadre de l’exécution du Plan national de développement (PND) 2012-2016, a fixé les principales missions que les départements ayant la charge de gérer le domaine privé et public de l’Etat devraient à accomplir en 2013. Parmi lesquelles, la promotion de l’accès des populations à la terre et la reconstitution du domaine public de l’État. L’épineuse question a aussi été évoquée lors du dernier Conseil des ministres 2013 : dans le communiqué final de leurs travaux, le président de la République a invité tous les membres du gouvernement à entretenir dans le pays un esprit patriotique pour l’émergence du pays. Ce qui se traduira par la préservation du caractère sacré du patrimoine de la nation, et la protection des biens immobiliers et mobiliers de la nation contre toute spoliation.

L’inapplication de la loi domaniale encourage la spoliation du domaine public et privé de l’État

Lors d’une session de questions orales à l’assemblée et, pour éclairer l’opinion publique sur les facteurs encourageant le phénomène de la spoliation du domaine de l’État congolais, le ministre des Affaires foncières et du Domaine public a reconnu que le patrimoine privé et public du pays était en voie d’être spolié par le simple fait que la loi domaniale serait mal appliquée. Ainsi, les cas les plus récents sont par exemple, ceux de l’hôtel Panorama et de l’ex immeuble d’Air Afrique qui étaient au centre d’une controverse entre l’État congolais et certains particuliers qui, à travers le faux en écriture, auraient usé d’une fausse lettre de désaffectation, signée par l’autorité habilitée de l’époque des faits de l’établissement de l’acte. Ce qui a été qualifié de transgression de la loi N°9 du 26 mars 2004 portant code du domaine de l’État. « Il faut que nous nuancions les choses, car lorsqu’il s’agit d’une location d’un bien de l’État, les seuls signataires de ce contrat sont les ministères des Finances et des Affaires foncières et du Domaine public. Ainsi, d’autres autorités inférieures n’ont pas cette compétence. Tout ce qui porte un titre foncier colonial à trois chiffres appartient à l’État, notamment en application du principe de la succession des États », précise-t-il, en invitant les gestionnaires des domaines de l’État au respect de la loi et des procédures, car malgré le fait que les textes en vigueur prévoient l’acquisition d’un bien de l’État par un particulier, elle se fait sous certaines conditions et de manière légale.

Un délai de six mois accordé aux spoliateurs des biens de l’État en 2014

Pour inviter tous les fraudeurs du domaine privé et public de l’État à renoncer de façon amiable à la spoliation, un délai de six mois leur a été accordé par le ministère des Affaires foncières et du Domaine public. En effet, selon le responsable de ce département, la gestion domaniale n’a pas besoin d’une intervention judicaire. Ainsi, toutes les autorités ainsi que les citoyens qui auraient confisqué les biens de l’État, plus précisément les immeubles et ses surfaces foncières sans droit, et se sont mis à construire, recevront dès le mois de janvier, une notification afin qu’ils soient délogés. « Dépassé ce délai, nous allons procéder par un déguerpissement forcé avec perte et fracas. Les biens de l’État sont imprescriptibles », a déclaré Pierre Mabiala. 

Des sons discordants entre la DCLBA et le ministère des Affaires foncières et du Domaine public

« À qui appartient la gestion du domaine privé et public de l’État ? » Telle est la question qui fait couler de la salive dans les quartiers de Brazzaville et au sein des différents services ayant la charge d’administrer les biens privés et publics de l’État congolais. L’interrogation fait suite aux différentes actions de déguerpissement que mène le ministère des Affaires foncières. Pour le chef de service du patrimoine immobilier et de l’équipement à la DCLBA, une confusion existerait sur les compétences attribuées aux différents départements chargés de gérer les biens domaniaux. Car, en terme de la loi domaniale congolaise, la notion de gestion est distincte de celle de protection. Parce qu’elle précise que le principal gestionnaire des biens du domaine de l’État est la direction générale des impôts et des domaines. « Dans la loi n°9-2004 du 26 mars 2004 portant code du domaine de l’État, on cite d’une manière répétitive les services des domaines. Cela ne signifie pas qu’il s’agit des services relevant du ministère des Affaires foncières et du Domaine public mais plutôt de ceux des impôts et des domaines », a-t-il déclaré.

Ainsi, pour lui, en application du décret 85/779 du 4 juin 1985, la DCLBA a la compétence de gérer une partie des biens de l’État. À savoir, les logements et bâtiments administratifs. Cependant, ses actes de gestion sont multiples : l’affectation de logement et des bâtiments ainsi que leur retrait, la préparation des dossiers liés à la conclusion des contrats de l’État, portant sur ces biens sans oublier leur cession ou vente. Concernant leur vente, la délivrance des titres fonciers, l’établissement des actes de cession, la responsabilité incomberait aux services des impôts et des domaines qui préparent un arrêté à la signature du ministre des Finances.

Par ailleurs, selon les attributions, les affaires foncières ont la mission de protéger et non de gérer. « La DCLBA est née de la fusion de deux services appartenant à deux départements ministériels distincts, notamment le service central des logements administratifs qui relevait de la direction de l’administration et de l’équipement du ministère des Finances et le service d’entretien des bâtiments administratifs qui était attaché au ministère des Travaux publics. Donc, à travers les services des impôts, le ministère des Finances a la gestion du domaine de l’État », explique le chef de service du patrimoine immobilier et de l’équipement à la DCLBA.

En définitive, l’État congolais arrivera-t-il à récupérer tout son patrimoine spolié, car, d’après les services compétents l’opération de référencement enclenchée par le gouvernement, connaîtrait des problèmes. Notons que l’un des facteurs du fléau serait aussi le non respect des délais du contrat de bail qui, selon les textes, ne devrait pas dépasser 5 ans.

Selon la loi domaniale, le domaine de l’État est l’ensemble des biens et droits, mobiliers et immobiliers, corporels et incorporels appartenant à l’État, aux collectivités locales et aux établissements publics. Il comprend le domaine public et privé.
- le domaine public est l’ensemble des biens et droits des collectivités et des établissements publics qui sont, soit mis à la disposition directe du public, soit affectés à un service public. Il n’est pas susceptible d’appropriation privée, car il est incessible, insaisissable, inaliénable et imprescriptible (la règle des 3 i)
- le domaine privé est composé des biens meubles, immeubles et droits réels immobiliers du domaine de l’État, des collectivités décentralisées et des établissements publics qui, en raison de leur nature et de leur destination, ne sont pas considérés comme dépendance du domaine public.
- Une propriété est composée d’immeubles d’habitation collective. Par exemple, l’immeuble des Italiens ou des coopérants qui comprend plusieurs logements, constituant une seule propriété.

Rock Ngassakys