Infrastructures : les Chinois attirés par la construction du barrage d’Inga

Jeudi 10 Septembre 2015 - 17:30

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Cette résolution du pays de Mao Tsé-toung a été explicitement exprimée par le président Xi-Jinping à son homologue congolais, Joseph Kabila, lors de sa dernière visite en Chine.

La réalisation du projet intégrateur du barrage d’Inga est convoitée par beaucoup de pays, qui ambitionnent de participer non seulement à la construction d'Inga III mais à celle de toutes les étapes, jusqu'à la huitième. Alors que la RDC est en processus avec la République sud-africaine, la Banque mondiale (BM) et la Banque africaine de développement (BAD), la Chine vient clairement d’exprimer ses ambitions de participer à la construction de cette centrale prévue en huit phases. « Nous avons les moyens de le réaliser », a dit le président Xi-Jinping à son homologue Joseph Kabila, lors de leur tête-à-tête le 4 septembre à Pékin.

Face à ce que l’on peut considérer comme un autre rebondissement pour ce projet, des questions fusent. La RDC pourrait-elle accepter l’offre de la Chine ? Et si le président Joseph Kabila répondait favorablement à cette demande de la Chine, quelles en seraient les implications et les conséquences ?

Le pragmatisme dans les affaires

Le président chinois Xi-Jinping, cité par CCTV-français, a souligné que son pays était prêt à travailler avec la RDC pour approfondir la coopération et développer le partenariat stratégique, afin d’obtenir des résultats gagnant-gagnant. Ce sont donc, soutiennent les observateurs de cette situation, le pragmatisme de la Chine dans l’exécution des projets et la nature du partenariat qu’elle offre, le troc, qui pourraient ainsi prendre le dessus sur les propositions des prêts contraignantes et rigoureuses des occidentaux et ainsi faire basculer la balance du côté de ce pays.

On le sait, d’ailleurs, le dépôt des offres techniques et financières des trois consortiums d’industriels présélectionnés pour la construction du barrage Inga 3 est prévu pour le 15 septembre. Mais déjà on note que des filiales de certains candidats développeurs retenus dont les sociétés chinoises China Three Gorges Corporation et SinoHydro et SNC-Lavalin du Canada figurent sur la liste noire de la BM. Ils sont, en effet, soupçonnés de fraude et de corruption en Afrique.

Devant cette réalité, l’opinion se pose, par contre, des questions sur l’implication de cette institution de Bretton Woods, sachant que ces sociétés, bien que n’ayant pas une « bonne réputation » auprès de la BM, ont quand même peaufiné leurs cahiers des charges avec le financement de cette institution. « Rien ne prouve que dans la sélection, l’influence de la BM ne s’exercerait pas sur les cabinets conseils prestigieux du gouvernement (Banque d’affaires Lazard, Cabinet d’avocats Orrick et Société d’ingénierie Tractebel). De quoi douter de la crédibilité de ce processus ! », a même dit un analyste.

Et vint à nouveau la Chine

Au moment où la Chine se présente dans cette course, beaucoup pensent que les relations tissées avec la RDC depuis le début de la décennie peuvent beaucoup jouer. On sait, en effet, que les plus grands projets de la RDC pour ces dix dernières années sont réalisés par les Chinois.

C’est donc ici la « crainte », pour certains, de voir la RDC arrêter, en importe quel moment, le développement du projet Inga 3 en cours avec ses partenaires des institutions des Bretton Woods pour des raisons de « souveraineté ».

Certaines indiscrétions parlent déjà d’une décision prise au niveau des autorités congolaises dans ce sens et dont les institutions financières sont au courant. Pour ces sources, qui déplorent le temps passé depuis la conception de ce projet sans que quelque chose de consistant ne soit faite, la lourdeur administrative et les conditionnalités qui entourent les engagements et décaissements des bailleurs des fonds traditionnels serait l’une des motivations majeures du pays de Joseph Kabila, qui sait estimer les avantages et les désavantages de cette option.

Si parmi les avantages, on peut notamment citer la liberté, pour la RDC, de construire avec l’appui de la Chine le barrage Inga III à 8,6 milliards de dollars américains (USD), tout en gardant la main mise sur son patrimoine de manière exclusive, alors qu’elle aurait pu payer des intérêts de plus de 3 milliards ramenant le projet à 12 milliards, il y a, en face, comme désavantages, toutes ces personnes et structures que le pays de Joseph Kabila devra désintéresser.

La BM et la BAD, par exemple, qui ont déjà financés les études de faisabilité évaluées à 142 millions USD, s’attendrait au remboursement de ce montant, avec des pénalités et taux d’intérêts. Alors qu‘il faille également honorer les contrats des trois cabinets conseils du gouvernement, qui seront dès lors remerciés pour le travail accompli jusque-là et pour lequel ils ont été payés de manière ponctuelle. Ces contrats varieraient, selon des sources, de 18 millions à 24 millions de dollars pour la période 2011-2018, soit environ 1 million de dollars par société par an. La RSA, elle, n’attendrait que la fourniture de ses 2500 MW pour achat, le moment venu, selon les conditions définies.

Il est, en effet, noté que le gouvernement est depuis toujours à la recherche d’un concessionnaire capable de construire et d’exploiter Inga III (en apportant des capitaux conséquents) et non plus d’un simple développeur de projet. « Pourquoi ne pas associer l’enthousiasme du Congolais manifesté par ses dirigeants au pragmatisme des chinois ? », s’est demandé une source proche de ce dossier. On est pas loin d’oublier le précédent fâcheux entre la RDC et l’Occident, quand Joseph Kabila avait choisi de travailler avec la Chine, dans le cadre du programme gouvernemental, les Cinq chantiers. Mais il s’agirait ici de prôner un partenariat gagnant-gagnant et de travailler avec des partenaires actifs qui donnent des résultats dans un temps record. « Time is money », disent les Anglais. Ce qui signifie que quand on perd du temps notamment dans des machineries trop lourdes, c’est l’argent qu’on est en train de perdre, sans compter avec la durée éphémère de la vie humaine.

Lucien Dianzenza

Légendes et crédits photo : 

Photo 1: Une vue du barrage d'Inga. Photo 2 : Une topographie du site du Grand Inga

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