Les Dépêches de Brazzaville : Francis, nous sommes au centre national de Tubize où Charleroi s’entraîne en ce moment, et tu as l’air en pleine forme…
Francis Nganga : Oui, je suis bien. Tous les voyants sont au vert : j’ai fait une bonne rééducation, je suis allé à Cap-Breton, le staff médical s’est bien occupé de moi, et j’ai bien travaillé pendant ces cinq mois… C’était dur et éprouvant, mais j'en récolte les fruits. Je retrouve les sensations.
En cette fin d’entraînement, tu as une poche de glace sur le genou. Que dit-il, ce genou ?
Ce genou, il me demande encore beaucoup d’attention, il est encore un peu raide. C’est une blessure très traumatisante, et je ressens encore des petites douleurs après l’entraînement. C’est normal, mais il faut être à l’écoute de son corps.
Sur les prochaines semaines, quel est ton programme ?
Je m’entraîne normalement, sans appréhension, dans les courses et les frappes de balle. Il me faut continuer afin de retrouver toutes mes capacités et mes sensations gestuelles et techniques. J’étais pressé de revenir, mais en parlant avec le staff médical, j’ai compris qu’il fallait être patient. En plus, le groupe tourne bien, donc il n’y a pas d’urgence. Je pense qu’il me faut encore quatre à six semaines de travail pour être apte à retrouver la compétition.
En ton absence, après quelques semaines difficiles, tes coéquipiers réalisent un très bon parcours et sont encore en lice pour une place en Ligue Europa. Cette aventure européenne serait un beau cadeau de retour…
La route est encore longue (un match de poule, la finale des play-offs II et une confrontation avec le 4e des play-offs I, NDLR), mais l’équipe fait un superchampionnat. Avant ma blessure, on tournait bien, avec un groupe qui se connaissait par cœur. Avec mon absence, puis le départ de trois titulaires (Kaya, Pollet et Milicevic, NDLR), l’équipe a dû trouver un nouvel équilibre. Nous sommes bien embarqués dans ces play-offs, et ça serait génial que les supporteurs retrouvent l’ambiance de la Coupe d’Europe, presque dix après la dernière participation du club (Coupe Intertoto 2005, NDLR).
Outre cette possible Ligue Europa, les prochaines échéances seront avec la sélection et les tours préliminaires de la CAN 2015. L’équipe nationale te manque ?
Je suis un patriote, et depuis ma première sélection en 2008, l’équipe nationale est ma priorité absolue. Après, il ne faut pas refaire les erreurs commises ces dernières années en faisant jouer des éléments qui ne sont pas aptes à 100%. Clairement, je ne serai pas prêt pour le premier tour. Maintenant, si le coach Le Roy a envie et besoin de faire appel à moi pour encadrer les plus jeunes, je répondrai à l’appel avec honneur et plaisir.
Claude Le Roy a procédé à un renouvellement de l’effectif lors de sa première liste en mars. Avec le départ de la génération Mouko-Éwolo, les joueurs de ta génération, celle des Ndinga, Oniangué, Malonga, Douniama, récupèrent le rôle de cadres, d’anciens…
Pendant dix ans, Barel et Oscar ont été les cadres de l’équipe, et aujourd’hui c’est à nous de reprendre le flambeau. À nous de nous en montrer dignes et de ramener les Diables rouges à la CAN. Nous sommes les plus capés, avec aussi Ondama, Mouithys et Moussilou. C’est un cycle naturel ! Un jour, des petits jeunes nous pousseront vers la sortie et prendront le relais. À nous de prolonger le discours du coach et de prendre nos responsabilités.
Récemment, Thiago Motta expliquait qu’il manquait au PSG, malgré son effectif, de la concurrence pour franchir le pallier des quarts de finale. Est-ce que les Diables rouges souffrent du manque de concurrence au sein du groupe pour progresser ?
Moi, je pense qu’on a une belle équipe, avec des éléments qui évoluent soit dans des clubs pros en Europe, soit dans des clubs locaux qui font les Coupes africaines, à l’image de l’AC Léopards. La concurrence existe, il y a beaucoup de bons joueurs. En fait, c’est davantage l’expression collective qui nous fait défaut. Nous n’avons pas été un groupe fort et puissant, et ça nous a desservis dans les matchs capitaux. Je pense qu’avec Claude Le Roy, et son immense vécu dans le foot, en particulier en Afrique, on va pouvoir progresser collectivement. Nous avons de la qualité, mais il faut que nous arrivions à nous arracher pour l’autre, à nous dépasser pour les coéquipiers. Nous avons des bons joueurs, mais pas de star. À nous de faire en sorte que la star, ce soit l’équipe.
Le tirage n’a pas encore été effectué (l’interview a eu lieu jeudi 24 avril, NDLR), mais que t’inspirent ces deux tours préliminaires, contre des équipes souvent méconnues, avec de longs déplacements, hors des dates Fifa ?
À la fois beaucoup d’optimisme, car je crois en ce groupe. Mais aussi beaucoup de méfiance, car ces rencntres face à des équipes moins bien classées sont souvent des matchs pièges. Mais l’optimisme l’emporte, car j’ai eu de très bons échos du rassemblement en Tunisie. Notre marge de progression collective est énorme. J’ai toujours pensé que notre génération serait optimale entre 27 et 30 ans car plusieurs d’entre nous ont percé sur le tard en première division, comme Maël, Ladislas, Prince ou moi. Du coup, nous avons eu un déficit d’expérience du plus haut niveau que nous sommes en train de compenser. C’est notre moment qui commence. À nous de ne pas laisser passer notre chance.