Exploitation minière à une condition : investir dans les infrastructures de transport et portuaires

Lundi 26 Mai 2014 - 21:23

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimableEnvoyer par courriel

Le lourd investissement des sociétés privées dans le secteur minier congolais prouve à suffisance que le Congo regorge d’importants gisements aux riches provisions. Des projets arrivés à maturité annoncent des productions pour bientôt. Mais la question de l’évacuation des minerais vers le port, à Pointe-Noire, conditionne la mise en exploitation. Observations. 

Dans le sud-ouest du pays, dans les départements du Niari et de la Lékoumou ainsi que dans la Cuvette et la Sangha, au nord, des projets miniers sont en phase de développement avancés. « Bientôt la filière lancera ses productions », lançait lors d’une émission le ministre des Mines et de la Géologie, Pierre Oba, dont le département, principal adjudicateur des permis de recherche et de production, prévoit ce boum dans deux ans, voire trois.

Quelque soit la localisation du gisement, en effet, la question que se posent désormais les sociétés et l’État est celle de savoir comment, à terme, évacuer des minerais. Dans le Niari, par exemple, la société DMC iron, filiale du Sud-Africain Exxaro qui conduit le projet Mayoko-Lékoumou, et son voisin Congo Mining, qui développe le projet de Mayoko-Moussondji, passeront par la voie ferrée. Mais ce n’est pas gagné d’avance. Pour atteindre Pointe-Noire, ils devront utiliser l’ex-Comilog, en passant par Mont-Bélo avant d’atteindre le Chemin de fer Congo-Océan (CFCO). Il leur faudra donc investir dans la réhabilitation du chemin de fer. À l’heure actuelle, les discussions ont été engagées entre Exxaro et le CFCO. Une partie du minerai devrait passer par là, car, selon les prévisions, le CFCO ne pourra pas contenir les 20 millions de tonnes prévus par l’exploitation de Mayoko. Sa capacité serait de 6 millions de tonnes.  

« S’il y a une production de minerais il faut bien les transporter en direction d’un port »

La phrase est du directeur général des Mines, Louis-Marie Djama. Il répondait à la préoccupation du gouvernement qui mène un projet de construction d’un port minéralier à Pointe-Noire. Si les infrastructures de transport constituent un goulot d’étranglement, les installations portuaires pour le stockage et le chargement du minerai sont, en retour, un enjeu majeur. Les travaux de ce port ont été confiés à la China Road and Bridge Corporation, une société chinoise plus connue sous son sigle de CBRC. En attendant ce port minéralier dont la livraison n’est pas pour maintenant, le Port autonome de Pointe-Noire (PAPN) envisage la construction d’un quai capable de traiter 3 millions de tonnes de minerai par an.

Des prévisions qui peuvent faire sourire DMC Iron qui vise dans un premier temps une production de 3 millions de tonnes par an d’ici 2015. Mais, le PAPN ne pourra pas contenir ses 10 millions de tonnes par an prévus en pleine exploitation. « C’est pourquoi, le gouvernement a pensé construire un port minéralier pour permettre une meilleure production. Ce sont donc les Grands travaux qui sont chargés de suivre ce dossier. Il conditionne non seulement la mise en exploitation des gisements mais aussi le niveau des productions », souligne Louis-Marie Djama sans donner une date précise sur la fin des travaux. Congo Mining, pour sa part, prévoit une production de 300.000 tonnes par an avec des perspectives de 10 millions de tonnes par an en pleine exploitation.

Un pipe-line pour le fer de Zanaga

Le chemin de fer n’est pas le seul moyen de transport des minerais. « Nous pouvons aussi conditionner les minerais et les transporter par pipe-line. C’est ce qu’envisage la société MPD de Zanaga », commente le directeur général des Mines. C’est finalement l’option pipe-line qu’a retenu Mining Projects Developement (MPD). Mais le projet, compte tenu de la taille de son investissement, ne pourra pas être prêt avant 2017, souligne-t-on. Toutefois, le gisement de MPD situé dans le département de la Lékoumou, est des plus prometteurs, avec 6,8 milliards de tonnes (d’une teneur de 60% en hématite) et 55 millions de tonnes par an.

Un « chemin de fer de l’Ouest » pour les gisements de la Sangha

Pour évacuer les minerais qui sortiront des trois grands projets menés dans le département de la Sangha, l’État congolais prévoit de construire un chemin de fer dit de l’Ouest. Sur 1.500 km, il partirait de ce département jusqu’à la mer, à Pointe-Noire. Les études de ce projet ne sont pas encore lancées. « Ce chemin de fer est dans un horizon lointain », précise Louis-Marie Djama. Pourtant, les projets Avima, développé par Avima Fer (ex-Core Mining Congo), Nabemba conduit par Congo Iron et Badondo, mené par Equatorial Ressources, recherchent des moyens plausibles d’évacuation de minerais. En attendant les études, ces sociétés passeront par le Cameroun ou le Gabon, explique-t-on. Ce qui est sûr, la plupart des sociétés opérant dans la Sangha sont installées au Cameroun et au Gabon. Ils utiliseront les schémas conçus par les succursales des pays voisins.  

L’exploitation minière au Congo, c’est aussi le département de la Cuvette-Ouest. Là-bas, précisent des notes, la question du transport ne se pose pas encore avec acuité. Pour cause : les exploitations n’ont pas encore donné de résultats concluants. Sur place, on retrouve des sociétés comme AfriRessources Congo, Africa Mining Developement…

Former des Congolais aux nouveaux métiers des mines

Le boum minier si l’on peut l’appeler ainsi permettra le déploiement de milliers d’emplois. « Si nous prenons un projet comme celui de Zanaga, nous serons autour de 8.000 emplois. Ce qui n’est pas mal », se réjouit Louis-Marie Djama. Mais le véritable problème, souligne-t-il, est celui de la formation. « Ce sont des spécialités nouvelles où interviennent des industries chimiques. Pour occuper un poste dans une usine il faut être qualifié », explique-t-il. Pour permettre un meilleur développement humain dans ce secteur, l’État a déjà ouvert les yeux sur la question. Des consultations entre différents départements ministériels ont été déjà initiées afin de trouver des formations adaptées. Car il faudra éviter que le développement minier oublie de se servir de la main d’œuvre locale, qui attend. 

Quentin Loubou et Rock Ngassakys

Légendes et crédits photo : 

photos 1 et 2 : Chantiers d'exploitation minière. photo 3 : Le directeur général des Mines, Louis-Marie Djama.