Loi électorale : à peine votée, déjà attaquée pour inconstitutionnalité

Mardi 5 Décembre 2017 - 18:00

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En l'absence de consensus, certains députés nationaux ont décidé de saisir la Cour constitutionnelle pour relever les contradictions entre la Constitution en vigueur et le texte de loi voté le 5 décembre, à la chambre basse du Parlement.

Après moult atermoiements, le projet de loi modifiant et complétant la loi n° 06/006 du 9 mars 2006 portant organisation des élections présidentielle, législatives, provinciales, urbaines et locales a finalement été voté à l’Assemblée nationale. C’est tard dans la nuit du 4 décembre que les députés ont approuvé ledit projet de loi électorale après son examen approfondi dans la commission politique, administrative et judiciaire (PAJ) de l’institution parlementaire. Article par article, les députés étaient tenus de relire les différentes dispositions après toilettage du document par les experts de la commission. De nombreux amendements ont été apportés audit projet qui est passé sous la rampe de la critique parlementaire sur fond d’un débat houleux.

En l’absence des députés de l'opposition qui ont boycotté la séance plénière pour désapprouver ce projet de loi qu’ils estiment en totale inadéquation avec la Constitution, leurs pairs de la majorité ont poursuivi l’examen jusqu’au vote. C’est presque à l'unanimité que la loi électorale a été votée. Deux cent quatre-vingt-sept députés sur un total de deux cent quatre-vingt-huit  présents ont voté en faveur de cette loi électorale, faisant ainsi fi des récriminations qui fusent de leurs collègues de l'opposition.   Ainsi donc, certains points qui jusque-là faisaient l'objet de pomme de discorde ont pu être réglés. C’est notamment le cas avec la question du seuil de représentativité. Initialement fixé à 3% pour les élections législatives, ce seuil a  été ramené à 1%, et à 3% et 10% respectivement pour les provinciales, les municipales et locales.

"Le pacte républicain brisé"

Concernant la caution, les candidats députés nationaux sont dorénavant tenus à payer l’équivalent en FC de mille dollars américains pour un siège lors du dépôt de leur candidature. Les députés de la majorité n’ont pas non plus cédé à la pression de l'opposition qui ne voulait pas de la machine à voter qui, d’après elle, constitue une prime à la tricherie. Envers et contre tout, la majorité parlementaire s’est prononcée  en faveur de la machine à voter. Ces trois sujets à controverse (seuil de représentativité, caution et machine à voter) n’auront donc pas bénéficié du consensus tel que suggéré par l'opposition. Pour cette dernière, cette nouvelle loi électorale est une émanation des officines de la majorité présidentielle qui tient à baliser la voie dans la perspective d’un triomphe électoral. En fait, d’après l’opposition parlementaire, la loi électorale tel que votée viole la Constitution et sacrifie les indépendants du fait de l’introduction du seuil de représentativité en violation du principe de l’égalité. La nouvelle loi électorale tend, en effet, à les soumettre de force au suffrage indirect en lieu et place du suffrage direct et secret de leur seule circonscription. Et d’ajouter que cette nouvelle donne vient briser le pacte républicain obtenu à l’issue du Dialogue inter-congolais à Sun city qui avait adopté un système tel que « celui qui gagne ne gagne pas tout et que celui qui perd ne perd pas tout » pour le besoin de la cohésion nationale et de la paix sociale.  

"Une loi taillée sur mesure"

Bien plus, les députés de l'opposition ont fait remarquer la difficulté à calculer le seuil pour un candidat présenté par un parti politique ou pour un indépendant, ce qui risquerait de biaiser l’appréciation de ce que vaut réellement le postulant en terme de suffrages exprimés à l’échelle de sa circonscription. Il s’avère que toutes les propositions faites par l'opposition parlementaire, par rapport à cette loi électorale, ont été rejetées tant en commission PAJ qu’en plénière, indique-t-on. Qualifiant la nouvelle loi de déséquilibrée et d’anticonstitutionnelle, les députés de l'opposition croient dur comme fer qu’elle a été taillée sur mesure pour faire le lit du parti présidentiel aux prochaines législatives, quitte à l’imposer comme parti dominant dans l'hémicycle, dans la perspective d’une modification éventuelle de la Constitution. Aussi les députés de l'opposition avec Henri Thomas Lokondo en tête ont-ils décidé de saisir la Cour constitutionnelle pour inconstitutionnalité.

Alain Diasso

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