Les Dépêches de Brazzaville



Après l’Accord de Paris : Marrakech a accueilli le premier sommet de l’action des chefs d’Etat africains


Ce sommet extraordinaire s’est tenu en marge de la COP22. Il a été marqué essentiellement par des déclarations et des engagements liés à la lutte contre les changements climatiques et non au retour du Maroc au sein de l’Union africaine (UA) comme certains observateurs le pressentaient.

Tour à tour le roi Mohammed VI, les présidents Macky Sall du Sénégal, Alpha Condé de la Guinée, Paul Kagamé du Rwanda, Denis Sassou N'Guesso du Congo ou encore Salahedine Mezouar, président de la COP22, ont pris la parole pour exprimer l’urgence d’agir contre les changements climatiques.

« J’ai pris l'initiative de vous convier à ce sommet, afin que notre continent harmonise la lutte contre les changements climatiques, et l’action en faveur du développement durable », s’est exprimé Sa Majesté Mohammed VI.

« Concrétiser les projets régionaux et transnationaux structurants, tel est le défi que je vous invite à relever », a-t-il ajouté d’un ton solennel.

Il a proposé à ses pairs de dessiner une Afrique résiliente aux changements climatiques, une Afrique qui s’engage résolument sur la voie du développement durable (…) , une Afrique qui utilisera ses ressources, de manière optimale, en respectant les équilibres environnementaux et sociaux.

Le roi du Maroc a démontré combien l’Afrique était exposée au dérèglement climatique.

En effet, elle paie un lourd tribut dans l'équation « climat » et représente, sans aucun doute, le continent le plus pénalisé, alors qu’il n’émet que 4% des gaz à effet de serre.

D’après le souverain chérifien, l'Afrique compte déjà 10 millions de réfugiés climatiques. À l’horizon 2020, près de 60 millions de personnes seront déplacées du fait de la rareté de l’eau, si rien n’est entrepris dans ce domaine.

L’immense réserve d'eau douce, que constituait jadis le Lac Tchad, a déjà perdu 94 % de sa superficie, et est menacée d’assèchement définitif. Au moins 4 millions d’hectares de forêts, soit deux fois plus que la moyenne mondiale, disparaissent chaque année.

« Les rendements agricoles de notre continent pourraient donc baisser de 20% à l’horizon 2050, au moment même où notre population aura doublé », a souligné encore le roi Mohammed VI.

Au sommet de Marrakech, les chefs d’Etat africains ont exposé des initiatives nationales et sous-régionales de lutte contre la désertification au Sahel , de protection des Etats insulaires et de préservation du Bassin du Congo.

Toutes ces initiatives, tout comme celles qui sont liées à l’adaptation de l’agriculture,  nécessitent autant de financements pour leur mise en œuvre. Accéder aux énergies « propres » ou renouvelables est aussi un désir exprimé par tous les dirigeants. Ainsi, le Sénégal se propose de réaliser d’ici à fin 2017 des projets solaires pour un total de plus de 300 mégawatts. « Ce que nous attendons de nos partenaires, c’est de nous soutenir sur le financement des énergies renouvelables », a plaidé le président Macky Sall.

 Présentant le projet du Fonds bleu pour le Bassin du Congo, qui a été du reste approuvé, le président Denis Sassou N'Guesso a affirmé qu’il va contribuer à la préservation de la vie au plan mondial et assurer l’équilibre écologique.

Le Bassin du Congo est  l’un des plus impressionnants écosystèmes au regard de la grande diversité des espèces qu’il abrite.

Le Fonds bleu pour le Bassin du Congo se propose d’accompagner le développement des projets dans les secteurs clés pour le renforcement de l’économie de la région en offrant une alternative viable à la déforestation.

« Le Bassin du Congo, c’est la biodiversité abondante », a souligné M. Sassou N'Guesso.  

Les engagements des partenaires

Le sommet de Marrakech s’est soldé par une déclaration sur la co-émergence du continent. Elle a été lue en présence du secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, du président français François Hollande, et d’autres partenaires  tels les Emirats arabes unis, l’Arabie saoudite et le Qatar, pour ne citer que ceux-là.

Ban Ki-moon a laissé entendre que  le sommet de Marrakech a été « de grande envergure ». « J’exhorte les pays africains qui n’ont pas encore ratifié l’Accord de Paris à nous rejoindre. Il n’est pas une panacée certes, mais représente un cadre pour nos engagements  futurs », a-t-il déclaré.  

Vis-à-vis de l’Afrique, François Hollande a pris d’énormes engagements et rappelé ceux des autres bailleurs. Il a toutefois relevé que « Rien n’est acquis. Il faudrait se battre pour que les engagements et les signatures soient respectés. »

Des 100 milliards d’euros des financements annoncés au terme de l’Accord de Paris, la France s’est engagée à mobiliser une contribution de 5 milliards d’euros. « Nous avons fait plus que notre part », a lâché M. Hollande.

« Nous avons une dette écologique à l’égard du continent africain (…). La France sera là demain pour être la gardienne de l’Accord de Paris », a-t-il assuré.

Convaincue que l’Accord de Paris est fondé sur « la justice climatique » et que la  COP22 a été celle de l’action et des solutions avec le renforcement des coalitions, la France s’est engagée à soutenir les centres de formation africains dans le domaine des énergies renouvelables.

Elle a identifié 240 projets ou possibilités pour agir en Afrique où elle devra accroître la capacité d’accès à l’énergie de 10 gigawatts supplémentaires  à l’horizon 2020.

« Nous sommes prêts à agir au Sahel, dans le Bassin du Congo (…). L’Afrique est un continent d’avenir. Le développement de l’Afrique est une priorité pour le monde en général et  l’Europe en particulier », a fait savoir François Hollande, arguant que l’immigration et les « désordres sécuritaires » sont liés aux « désordres écologiques ».


La Rédaction

Légendes et crédits photo : 

Les chefs d’État africains participant au sommet extraordinaire de Marrakech