Pape François : l’an-1 d’un pontificat étonnantMardi 11 Mars 2014 - 19:09 Le premier pontife non-européen de l’histoire conduit l’Église à marche forcée vers des réformes inévitables Plus que quelques heures et le pape François va souffler la première bougie – d’anniversaire – de son pontificat. Il y a un an, en effet, le monde surpris découvrait le visage rond d’un nouveau pontife, Giorgio Bergoglio, archevêque de Buenos Aires en Argentine. En ce mois de mars 2013, cette surprise s’encadrait dans une autre surprise, sans doute plus grande, accomplie exactement deux semaines plus tôt, le 28 février 2013 : la démission volontaire d’un pape. L’Allemand Benoît XVI qui avait patiemment mûri sa décision sans prendre le conseil de personne (sinon de son frère Georg, prêtre comme lui), décidait de céder sa charge à un plus jeune. Et celui-ci, 76 ans, allait étonner le monde par ses premiers gestes, ses premières paroles. Depuis lors d’ailleurs, il n’a pas cessé de surprendre et d’imprimer à la papauté une inflexion qui la rend désormais moins distante, mois murée dans les lambris du Vatican. « Bonsoir », « Priez pour moi » et « Bon appétit » : des paroles prononcées depuis la loggia du Vatican où elles n’avaient pas l’habitude de se faire entendre. Le pape venait au monde catholique avec des accents d’un dépouillement complet de sa fonction tout en gardant la ligne de fermeté du magistère et sa solennité multiséculaire. Pas de mules rouges de pape au pied mais des souliers à bouts arrondis, comme tout curé de campagne – surtout jésuite. Pas de luxueuses voitures de fonction, des limousines coûteuses entretenues à coups de millions mais une Ford Mondeo, presque ordinaire, en tout cas de celles que l’on croise à chaque coin de rue même en Afrique (héritage de son prédécesseur ; son secrétaire à lui circulant dans et hors du Vatican à vélo). Pas d’aide de camp portant sacoche et tout le nécessaire d’un chef d’État. Pas d’appartements pontificaux (de 500 m2) mais un logement spartiate dans la Maison Sainte Marthe, la maison des cardinaux de passage au Vatican, construite par Jean-Paul II. On n’épuiserait pas les marques d’humilité de ce pontife dont, pourtant, les réformes les plus profondes ne sont pas seulement dans le geste et la promesse de changements. Sur le plan financier, il a engagé la tâche titanesque de redresser la gestion des institutions du Vatican en s’aidant, fait nouveau là aussi, d’un Conseil de 8 cardinaux, eux-mêmes désormais fidèles aux conclusions d’un audit mené au Vatican par deux cabinets internationaux impartiaux. Création d’un « ministère » de l’économie qui n’aura de compte à rendre qu’à lui, directement ; dégraissage de la fonction publique vaticane, suppression des trop nombreux postes de dépense… S’il y a des critiques aujourd’hui, surtout dans les milieux fondamentalistes catholiques où l’on n’apprécie pas trop que la personne du pape se « désacralise » ainsi, une grande majorité de catholiques mais aussi, fait nouveau, de non-catholiques, créditent ce pape venu des pays chauds d’une réelle volonté à changer. Les militantismes de tous acabits ont beau l’attendre encore au tournant sur des questions comme la femme, l’homosexualité, les divorcés-remariés, l’ordination des femmes, etc. ce qui ressort du simple constat empirique de l’opinion est un « peut mieux faire ». Sinon, carrément, un « va mieux faire » pour les optimistes. Au moment où nous écrivons ces lignes, le chef de l’Église catholique – fait nouveau, là aussi – prend part à Ariccia, près de Rome, aux exercices spirituels du Temps de carême qui se déroulent habituellement à l’intérieur du Vatican. Et il s’y est rendu avec l’ensemble des cardinaux de la curie romaine en autobus, leur demandant de payer chacun sa chambre à la fin de ces exercices qui prennent fin vendredi et sont prêchés par un simple prêtre. « Qui suis-je pour juger ? », avait-il répondu en juin lorsqu’on lui demandait sa position sur les homosexuels dans l’Église. Une phrase-annonce de promesses de réformes pour certains, ou de possibles décadences pour les autres qui estiment qu’un pape n’a pas à se justifier et qu’il sait toujours tout. Lucien Mpama |